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Appliquer les quatre accords toltèques dans son quotidien de vétérinaire

Crédit photo @ Madrugada Verde - stock.adobe.com
Que l’on soit adepte du développement personnel ou non ; que l’on soit sensible à une certaine forme de spiritualité ou non ; on peut porter un regard curieux voire intéressé sur les enseignements des Toltèques. Vulgarisés par Don Miguel Ruiz sous la forme de quatre « accords », ces préceptes mexicains trouvent une résonance particulière dans le quotidien de chacun. Et dans le milieu vétérinaire, alors ? Quand le travail est une source d’épanouissement mais également, parfois, de souffrance, n’aurait-on pas intérêt à prêter une oreille attentive à ce que les Toltèques ont à nous dire ? En ne nous promettant rien de moins qu’un accès au bonheur et à la liberté, ce code de conduite se résume finalement à quelques phrases très simples. Voyons de quelle manière celles-ci peuvent s’appliquer aux vétérinaires, avec légèreté mais sans nous départir de notre sens critique !

L'origine des accords toltèques

Les Toltèques existent depuis des milliers d’années dans le Sud du Mexique. On les décrit comme des hommes et des femmes de connaissance, dont les maîtres (naguals ou chamans) transmettent leur savoir et leur sagesse de génération en génération. Don Miguel Ruiz, petit-fils de nagual, est l’auteur du livre « Les quatre accords toltèques » [1], qui a été publié en 1997 et rapidement vendu à des millions d’exemplaires. L’auteur, anciennement neuro-chirurgien, se consacre maintenant au partage des enseignements des anciens Toltèques.

Miguel Ruiz a constaté que nous étions tous limités par certaines de nos croyances, développées depuis l’enfance à force de conditionnements culturels et éducatifs. Ces croyances façonnent notre façon de percevoir le monde (ce qui est « bon » ou « mauvais ») et de nous percevoir nous-mêmes (« Je dois être comme ceci. » ou « Je dois réussir. »). A cause de cela, nous nous jugeons sévèrement à longueur de journée et finissons par croire que nous méritons les situations désagréables que nous vivons.

Dans son livre, il propose de s’affranchir de ces croyances, en suivant les préceptes des Toltèques. Si ces idées peuvent paraître nébuleuses aux esprits les plus cartésiens, elles ne sont en réalité pas nouvelles et reprennent les principes de la thérapie cognitive. Pour préciser, la thérapie cognitivo-comportementale (TCC) aide notamment les personnes à identifier et à modifier les schémas de pensée négatifs qu’elles cultivent sur elles-mêmes.

" Que votre parole soit impeccable "

Ce premier accord toltèque, le plus important selon l’auteur, est également le plus difficile à observer. Don Miguel Ruiz a constaté que la parole était un outil très puissant, destructeur même, dont les répercussions pouvaient s’étendre sur des années. Pour peu que l’on soit perméable aux jugements des autres, on peut absorber certaines critiques jusqu’à en faire notre vérité. Qui n’a jamais entendu, à son égard ou à celui du voisin, un « Tu ne réussiras jamais le concours véto » ? Si cela a peut-être eu un effet moteur sur certains, cela a certainement découragé quelques vocations. Se persuadant de ne pas être à la hauteur, on se limite de manière inconsciente, et nos échecs éventuels viennent valider et renforcer nos croyances : « Je savais bien que je n’y arriverais pas. »

Par la suite, sur les bancs de l’école, lors des rotations cliniques ou même en stage, on a également pu entendre des « Vous êtes tous nuls ! » ou « Tu n’es pas fait pour ça ! ». Ces paroles plantent des graines et fragilisent sa confiance en soi. Si on n’a pas la chance de rencontrer des personnes bienveillantes lors de ses premières expériences professionnelles, on peut laisser le doute et le découragement s’installer. Un patron qui n’aurait pas conscience du poids des mots utilisés, ou bien qui les utiliserait à mauvais escient, peut ainsi changer la trajectoire professionnelle de ses salariés vétérinaires. « Tu ne fais pas l’unanimité auprès des clients. » ou « Remets-toi en question, tu es passé à côté d’un diagnostic facile. » ou encore « Tes sutures sont toujours ratées. » Autant de jugements que l’on finit par retourner contre soi : « C’est vrai, je ne suis pas fait pour la chirurgie. » ou bien, « Je ne suis pas un assez bon vétérinaire, c’est normal qu’on ne m’apprécie pas. »

Avoir une parole impeccable signifie donc ne pas être dans le jugement, ou dans la critique gratuite. Cela signifie également s’interdire la médisance, afin de ne pas influencer les personnes qui nous entourent. Si l’on porte un jugement sur un client, par exemple, « Attention, il est très désagréable. » ou encore « Il ne comprend rien ! », le vétérinaire qui le recevra pour la première fois sera influencé par cette opinion, et en aura une image d’emblée défavorable. La consultation sera peut-être plus tendue et les relations moins fluides. De la même manière, si nous sommes cette personne qui juge et critique de manière injuste, nous recevrons en retour du ressentiment et de la colère.

A l’inverse, la parole est outil qui peut aussi construire. En recevant la confiance de ses collègues, en se sentant épaulé (via une relation de mentorat par exemple), on peut au contraire se révéler dans son travail et sortir des spirales négatives.

" Quoi qu'il arrive, n'en faites pas une affaire personnelle "

Ce deuxième accord toltèque découle directement du premier, et il s’applique particulièrement bien aux vétérinaires. Car s’il y a bien quelque chose de très fréquent chez les praticiens, c’est de tout prendre très à cœur, particulièrement les critiques proférées par les clients.

Si on fait de tout une affaire personnelle, on va finir par croire ce que les autres pensent de nous et valider leurs opinions. En réalité, quand on se fait traiter de « vétérinaire incompétent », cela ne concerne que la personne qui a émis cette critique. Nous ne sommes pas responsables des actions ou des pensées des autres. Croire le contraire, c’est finalement s’accorder un peu trop d’importance !

Prenons l’exemple d’un client qui amène son chiot, jamais médicalisé, auquel on diagnostique une parvovirose. Malgré les perfusions et les soins adéquats, l’état de l’animal se dégrade et celui-ci finit par décéder. Le client est mécontent, nous reproche de n’avoir pas su soigner son chien, et se plaint de sa prise en charge. Le vétérinaire, impliqué et consciencieux, pourrait vivre la situation de façon injuste et personnelle. Mais si le client nous considère inapte, c’est finalement lui que cela regarde. Le vétérinaire n’est pas responsable de la situation.

En faire une affaire personnelle nous expose à absorber le poison des critiques. A l’heure des réseaux sociaux et des déferlements de haine qui touchent régulièrement la profession, il est très facile de se sentir touché personnellement. Pourtant, c’est oublier que chacun regarde le monde avec ses yeux. Se défendre pour prouver que l’on a raison et imposer son opinion montre surtout que l’on a été touché. Si on se sent particulièrement blessé par la critique, ce sont en réalité nos propres blessures internes qui sont activées. Observer le deuxième accord toltèque permet au contraire de prendre du recul et de laisser à l’autre la responsabilité de ses actes.

" Ne faites pas de suppositions "

De nombreux problèmes de communication découlent de notre propension à prêter des intentions à nos interlocuteurs. Nous avons tous tendance à faire des suppositions sur ce que les autres font, ou pensent. Par peur, ou bien par paresse, nous ne posons pas suffisamment de questions, alors que celles-ci sont indispensables pour clarifier les envies de chacun. A la place, nous supposons que les personnes qui nous entourent ressentent et voient les choses comme nous.

En clientèle, l’expérience tend à vite nous faire catégoriser les différents profils de clients. En réalité, il est très facile de rentrer dans le piège du procès d’intention. Si l’on voit arriver un client négligé, dont l’animal n’est suivi qu’en cas d’urgence, on peut supposer à tort que celui-ci ne souhaite pas investir beaucoup d’argent dans les soins de son compagnon. On pourrait alors commettre l’erreur de l’orienter d’abord vers un traitement symptomatique sans diagnostic précis, alors que celui-ci souhaiterait au contraire aller plus loin. Ou bien, on pourrait ne pas lui présenter clairement toutes les options thérapeutiques, en mettant de côté les plus coûteuses. C’est pourtant notre rôle, mais combien de fois a-t-on voulu faire l’économie d’un examen pour soulager le portefeuille du client, alors que celui-ci n’a encore rien exprimé à ce sujet ?

De la même manière, nous aurions intérêt à éviter les suppositions dans les relations de travail. Un salarié très impliqué et fidèle au poste depuis plusieurs années pourrait naturellement s’attendre à une augmentation. Mais s’il suppose que son employeur sait bien que cette augmentation est attendue, et que celle-ci ne vient pas, il se sentira blessé. Verbaliser ce que nous voulons vraiment permet d’éviter les difficultés et les incompréhensions. Du côté patron, il faut avoir le courage de demander à ses employés ce qu’ils souhaitent réellement. Une communication claire peut tout changer des relations !

" Faites toujours de votre mieux "

Ce quatrième et dernier accord est celui qui rassemble les trois premiers. Il s’agit de faire de son mieux dans son quotidien et dans son travail, ni plus, ni moins. C’est parfois ce qui fait défaut aux vétérinaires, qui ont des personnalités perfectionnistes et acharnées de travail. Il est difficile de reconnaître que l’on a fait de son mieux, notamment lorsque l’on vit des situations délicates (décès d’un patient lors d’une opération de convenance, complications lors d’une procédure qui est pourtant bien maîtrisée, échec à établir un diagnostic pointu…). Pourtant, si l’on s’obstine à faire davantage que notre « mieux », on risque de dépenser trop d’énergie pour un résultat que l’on jugera toujours insuffisant. Vidés d’énergie, on s’expose au burnout, malheureusement fréquent dans notre profession.

Selon l’auteur, on peut retrouver le goût du travail si l’on se contente de faire de notre mieux. On agit alors pour le plaisir, sans attendre de récompense. Le travail n’est plus une contrainte nécessaire pour gagner de l’argent, mais quelque chose qui nous anime au quotidien. Si l’on fait de son mieux, on arrêtera de se juger et de se critiquer. Notamment, on se portera un regard plus bienveillant, en acceptant que notre « mieux » n’est pas le même tous les jours mais sera dépendant de notre forme physique et psychique du moment.


Alors, ces quatre accords toltèques vont-ils changer notre vie de vétérinaire ? Il serait bien présomptueux de l’affirmer, mais on peut au moins reconnaître qu’ils trouvent des applications directes dans notre quotidien. Finalement, peu importe les stratégies employées pour se sentir mieux et gérer les situations les plus délicates, on recherche tous une forme d’épanouissement personnel. Malgré leurs promesses, les livres de développement personnel se contentent surtout d’apporter des pistes de réflexion. Nul doute que chacun pourra y puiser, ou non, les ressources nécessaires pour avancer et se révéler.

 

Astrid de Boissière,
Vétérinaire

 

Ressources documentaires et bibliographiques :

[1] Miguel Angel Ruiz M.D. Les quatre accords toltèques. Editions Jouvence, 2016, 141 p.

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