Pour qui ?
Il n'est pas réservé qu'aux salariés vétérinaires mais à tous les cadres censés être autonomes dans leur emploi du temps et qui ne peuvent pas forcément suivre l'horaire collectif ainsi qu'aux salariés autonomes dont la durée de travail ne peut être prédéterminée. En ce qui concerne les vétérinaires, il a été instauré (prévu par la convention collective) en raison des grandes variabilités dans l'organisation du temps de travail et de la longueur des journées imposée parfois par l'exercice libéral. Tout salarié vétérinaire à partir de l’échelon 2 (statut cadre) peut donc en bénéficier. En revanche, compte tenu de son caractère dérogatoire, on ne peut pas lui imposer : le choix de ce type de contrat doit donc se faire d'un commun accord entre le salarié et l'employeur (Code du Travail, art. L. 3121 - 55).
Notons que les ASV ne bénéficiant pas du statut cadre, ils ne peuvent bénéficier de ce type de contrat.
Combien de jours ?
Il est prévu par la convention collective que le salarié puisse travailler 216 jours pour une année civile, journée de solidarité comprise.
A noter que dans d’autres secteurs d’activités (autres conventions collectives), il est souvent de 218 jours.
Peut-on travailler plus de 216 jours ?
Si le salarié vétérinaire, en accord avec son employeur, souhaite renoncer à une partie de ses jours de repos, en contrepartie d'une majoration de son salaire, le nombre maximal de jours travaillés peut être porté à un maximum de 235 jours. Les jours supplémentaires doivent alors être rémunérés au moins à hauteur de 15 % supplémentaire. En effet, la rémunération forfaitaire du forfait jour inclus la rémunération des heures supplémentaires et des congés payés. Si le salarié ne prend pas tous ses congés payés, il faut les lui payer, d'où la majoration de 15 %.
Ex : Un vétérinaire qui travaille 227 jours par an, conformément à son contrat de travail sera rémunéré normalement à son échelon pour 216 jours et bénéficiera d'une majoration d'au moins 15 % pour les 11 jours supplémentaires travaillés, car il s'agit de jours de congés non pris.
Il convient de prévoir, dans le contrat de travail initial, cette possibilité de dépassement et le taux de majoration. La renonciation à des jours de congés doit être actée en cours d’année par écrit chaque année concernée.
➡ Pour tout savoir sur le décompte des congés payés, lisez notre article.
Que sont un temps complet et un forfait jours réduit ?
Un salarié à temps complet dispose d’un contrat de travail au forfait jours qui prévoit 216 jours par an.
Il est toutefois possible de prévoir dans le contrat de travail que le salarié travaille moins de 216 jours par an. On parle alors de « forfait jours réduit », par opposition à un forfait jours « temps complet ».
Notons que le vétérinaire salarié à temps partiel bénéficie des mêmes droits et avantages que celui travaillant à temps complet.
Aucune règle concernant les horaires, vraiment ?
Si un salarié au forfait annuel en jours est exonéré de la limitation de travail fixée à 10 heures/jour et à 35 heures/semaine, il n’est en revanche pas exonéré des règles du repos journalier et hebdomadaire, c'est à dire 11 heures de repos par jour et un jour de repos hebdomadaire d'une durée ininterrompue de 24 heures, en plus du repos journalier, soit 35 heures de repos consécutifs.
Sur quelle période sont décomptés les jours ?
La convention collective précise que le forfait annuel est calculé sur l'année civile, c'est à dire du 1er janvier au 31 décembre. Il ne peut pas être calculé sur 12 mois à cheval sur deux années.
Ex : Prenons une vétérinaire qui a travaillé douze mois dans une clinique du 01 octobre 2020 au 30 septembre 2021. Pour calculer ses jours travaillés, elle doit diviser la période en deux : " du 1er octobre au 31 décembre 2020 et " du 1er janvier au 30 septembre 2021 ".
Entre un contrat cadre intégré (heures) et un contrat cadre autonome (jours), que faut-il choisir ?
Le choix dépend des besoins de la clinique et des contraintes opérationnelles. Pour une structure dont les horaires d’ouverture et de fermeture sont relativement fixes, un contrat 35 ou 39 heures peut tout à fait convenir. En revanche, pour une clinique avec de gros volumes horaires, de longues distances à parcourir en voiture et des horaires très aléatoires, comme on le rencontre plus fréquemment avec des clientèles rurales ou équines, un forfait annuel en jours sera souvent plus adapté.
Notons qu’un employeur n’est pas obligé d’appliquer la même durée du travail (heures ou jours) pour tous ses salariés. Une clinique mixte peut décider de mettre ses salariés canins au contrat en heures et ses salariés en rural au forfait jours. Cela doit aussi résulter d’une concertation entre l’employeur et son salarié.
Rappelons qu’il n’est pas possible d’imposer à son salarié un contrat au forfait annuel en jours en raison de son caractère dérogatoire (Code du Travail, art. L. 3121 - 55).
Pourquoi le forfait jours est-il parfois décrié chez les vétérinaires ?
Parce qu’en ce qui concerne les vétérinaires, les salariés ne bénéficient pas toujours de l'autonomie requise dans l'organisation de leur emploi du temps puisqu'ils doivent travailler sur les horaires de consultation. Le fait qu'ils puissent bénéficier d'une convention au forfait jours peut parfois apparaitre antinomique. Toutefois, dans une affaire récente concernant les praticiens vétérinaires salariés, la Cour de cassation a confirmé le fait que le salarié en forfait annuel en jours ne bénéficie pas d’une liberté totale et que par exemple des plannings en fonction de l’ouverture de la clinique peuvent être mis en place.
Toutefois, la Cour de cassation a par le passé censuré les forfaits jours prévus par de nombreuses conventions collectives (Chimie, Commerce de gros, Syntec, etc.), considérant que ces dispositions ne permettaient pas de garantir une charge de travail raisonnable et d’assurer la santé et la sécurité des salariés. En conséquence, les salariés concernés étaient considérés comme aux 35 heures, entrainant des conséquences pratiques et financières (rappels d’heures supplémentaires notamment) pour les employeurs. Plusieurs branches ont depuis lors modifié les dispositions sur le forfait jours pour les rendre conformes à ces jurisprudences.
S’agissant de la convention collective des vétérinaires, la Cour de cassation ne s’est jamais expressément exprimée sur la validité du forfait jours. C’est pour cette raison que le forfait jours est parfois qualifiée de « bombe à retardement »…
Mais la question demeure : si cela arrivait, par quoi remplacer le forfait annuel en jours alors même que de nombreux vétérinaires travaillent plus de 10h par jour et de 39h par semaine ? Les forfaits annuels en heures sont une piste, tout comme la possibilité de mettre en place une convention collective d’entreprise instaurant un forfait jours conformes aux exigences jurisprudentielles.
Laure Denaiffe,
Consultante RH et droit du travail, Membre du réseau Adevet
Avec la collaboration de Maître Diane Reboursier, avocate au barreau de Paris, intervenant exclusivement dans le domaine du Droit du Travail.