Annabelle Orszag, docteure vétérinaire formée en ostéopathie, K-taping, cinésiologie, physiothérapie et réadaptation fonctionnelle chez le cheval
La lutte contre l’infection du site opératoire est une priorité en chirurgie, aussi bien humaine que vétérinaire. Le cheval fait partie des espèces sensibles au risque d’infection. En effet, un défaut d’asepsie peut entraîner des infections graves, comme des arthrites septiques ou des péritonites post-chirurgicales. Ces complications compromettent la santé, le bien-être et la performance du cheval, et peuvent s’avérer fatales. Regardons de plus près pourquoi l’asepsie est cruciale chez le cheval.
L’asepsie correspond à l’ensemble des mesures visant à éviter la contamination microbienne du site opératoire. C’est une composante essentielle en médecine équine. Pour être plus précis, on peut faire la distinction entre désinfection et antisepsie d’une part, qui permettent une destruction des germes pathogènes, et stérilisation d’autre part, consistant en une destruction totale de tous les germes, pathogènes ou non.
En raison de leur anatomie, de leur comportement et de leur environnement, les chevaux sont particulièrement sensibles à un défaut d’asepsie, que ce soit lors d’interventions chirurgicales, de soins de plaies ou de traitements médicaux. Cette sensibilité est amplifiée par leur mode de vie, souvent en contact étroit avec des sols contaminés, des litières humides et des microbes potentiellement pathogènes.
Voici les principaux facteurs identifiés :
Un environnement à risque : les chevaux vivent majoritairement en extérieur ou dans des boxes, des environnements où les bactéries prolifèrent (Staphylococcus, Streptococcus, Pseudomonas, Clostridium...). Ils sont souvent en contact avec des sols souillés (crottins, urines, boue), une source majeure de germes opportunistes.
La peau, une barrière vulnérable : leur peau est fine et fragile, avec un pelage qui peut retenir des saletés et des microbes. En cas de blessure ou d’intervention chirurgicale, cette barrière naturelle est rapidement compromise.
Une réponse inflammatoire importante : les chevaux sont connus pour avoir des réactions inflammatoires prononcées, notamment au niveau des articulations. Une infection mineure peut facilement dégénérer en septicémie ou en complications graves.
Un système immunitaire sensible : les chevaux, surtout les individus stressés ou affaiblis, peuvent présenter des défenses immunitaires réduites, favorisant le risque d’infection.
La contamination par des germes résistants en milieu hospitalier peut entraîner des infections dites nosocomiales, complexes à traiter. N’oublions pas qu’une infection allonge considérablement les temps de convalescence et peut laisser des séquelles fonctionnelles. Les infections localisées (plaies, articulations) peuvent évoluer en septicémie, mettant en jeu le pronostic vital du cheval. En outre, le traitement des complications infectieuses peut engendrer des coûts supplémentaires très élevés, en particulier pour les chevaux de compétition.
L'essentiel des micro-organismes est apporté dans le bloc opératoire par ce qui y entre, c'est-à-dire l'air, le cheval, l'équipe chirurgicale mais aussi les instruments et le matériel d'anesthésie, ainsi que les consommables (fils, compresses…). Tout ce matériel se doit donc d'être aseptique. Durant toute la chirurgie, les mouvements doivent être limités (notamment les entrées et sorties de la salle), les personnes stériles veillant également à ne toucher que des objets stériles… Après la chirurgie, le bloc doit être désinfecté dans les moindres recoins (y compris les roues de la table !).
Préparation du site chirurgical
Raser soigneusement la zone concernée pour limiter la présence de poils, pouvant être vecteur de germes ;
Nettoyer la peau avec un savon antiseptique, en effectuant des mouvements circulaires allant du centre vers la périphérie ;
Désinfecter en appliquant une solution antiseptique après le lavage (souvent en 2 ou 3 passages successifs) ;
Laisser sécher la solution antiseptique avant de manipuler la zone.
Environnement de l’intervention et matériel
Utiliser du matériel stérile, incluant les instruments chirurgicaux, les champs opératoires, les compresses et les gants ;
Vérifier que tout le matériel réutilisable a été correctement autoclavé ou désinfecté ;
Désinfecter préalablement la salle ou l’espace où se déroulent les soins ;
Limiter l’accès aux zones propres pour éviter les contaminations croisées.
Préparation du personnel
Se laver soigneusement les mains avant et après tout soin ;
Porter des gants stériles, des blouses propres et, si nécessaire, des masques chirurgicaux ;
Former régulièrement le personnel aux techniques d’asepsie.
Gestion des plaies et du post-opératoire
Utiliser des aiguilles et des cathéters stériles. Désinfecter le point d’insertion avant toute manipulation ;
Après une intervention, appliquer des pansements stériles qui doivent être changés régulièrement dans des conditions aseptiques ;
Utiliser des antibiotiques prophylactiques uniquement si nécessaire, sous prescription vétérinaire.
L’asepsie est un pilier de la santé équine, permettant de réduire le risque d’infections graves. Les conditions d’asepsie en médecine vétérinaire se sont considérablement améliorées ces dernières années, grâce notamment à la création de blocs opératoires (certains équipés de systèmes de filtration d’air et de stérilisation modernes) et l’utilisation de technologies avancées comme des biomatériaux antiseptiques pour les pansements et les sutures. En respectant des principes simples mais rigoureux, équipes vétérinaires et propriétaires peuvent ainsi assurer des soins de qualité, préserver la santé des chevaux et limiter les coûts liés aux complications.
L’autrice de cet article déclare ne présenter aucun conflit d’intérêt qui pourraient influencer ou biaiser de manière inappropriée le contenu de l'article.
Mise en ligne le : 17 janvier 2025
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